Un seuil trop élevé
Les décisions concluant à l’absence de « caractère distinctif inhérent » compliquent singulièrement la vie des requérants de marque de commerce.

Une récente modification apportée à la Loi sur les marques de commerce, qui ne donne pas d’orientation claire quant à sa mise en œuvre, impose un fardeau supplémentaire considérable aux requérants pour ce qui est du temps et de l’argent qu’ils doivent consacrer à démontrer que leur marque de commerce a un « caractère distinctif ».
La Section de la propriété intellectuelle de l’Association du Barreau canadien affirme qu’avant les récentes modifications, il n’existait aucun équivalent du pouvoir du registraire de faire opposition au motif qu’une marque de commerce n’a pas un caractère distinctif inhérent.
Dans une lettre adressée à l'Office de la propriété intellectuelle du Canada (en anglais seulement), la section a exprimé ses préoccupations quant au fait que l’OPIC a publié plusieurs rapports d’examens concluant à l’absence de caractère distinctif inhérent et a, par conséquent, exigé des éléments de preuve quant à l’acquisition du caractère distinctif. Elle affirme que la preuve ponctuelle suggère que jusqu’à un tiers des oppositions de fond visent des conclusions d’absence de caractère distinctif inhérent.
« Parmi les importantes conséquences pour un requérant figure l’accroissement des coûts puisqu’il doit répondre aux rapports et déposer des éléments de preuve de l’acquisition du caractère distinctif, le cas échéant », écrit la section.
« L’opposition peut être un obstacle insurmontable à l’enregistrement d’une marque dont l’utilisation est projetée. Qui plus est, la multitude de rapports soulevant cette opposition et des réponses nécessaires retardent le traitement des demandes en temps opportun. »
Parce que le Manuel d'examen des marques de commerce ne comporte aucune orientation claire sur ce point, la section dit que les conclusions d’absence de caractère distinctif inhérent ont été suivies à plusieurs reprises de rapports affirmant que les marques de commerce en question ont bel et bien un caractère distinctif inhérent.
La section pense que le seuil fixé dans le manuel pour le caractère distinctif est trop élevé, ce qui a conduit à un nombre d’oppositions qu’elle qualifie d’excessif. Elle propose de réviser le manuel pour qu’il reflète mieux la législation et d’éliminer le libellé sur lequel s’appuient les fréquentes oppositions au motif de l’absence de caractère distinctif inhérent.
Ainsi, le manuel est actuellement libellé comme suit : « Une marque de commerce possède un certain caractère distinctif inhérent si la marque en question ne réfère pas le consommateur à une multitude de sources lorsqu’elle est évaluée à la lumière des produits ou services liés. Il est considéré qu’une marque de commerce qui réfère à plusieurs sources n’a pas de caractère distinctif inhérent ».
La section recommande de remplacer cela par : « Une marque de commerce possède un certain caractère distinctif inhérent lorsque, considérée dans son ensemble, elle peut communiquer au public le fait que le requérant est la source des produits ou services liés. Même lorsque des portions d’une marque de commerce peuvent être élogieuses ou suggérer des produits ou services liés, la marque de commerce peut néanmoins posséder un certain caractère distinctif inhérent ».
La section recommande en outre l’ajout d’un libellé pour indiquer que le caractère distinctif doit être déterminé du point de vue du consommateur ordinaire, du grand public, et non du point de vue d’experts ou de spécialistes du secteur qui connaissent très bien des produits similaires.