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L’encadrement des intermédiaires du sociofinancement

L’ébauche de réglementation rate quelques cibles.

Canadian money
iStock

Depuis sa première utilisation en 2006, le terme « sociofinancement » (en anglais, crowdfunding,) est entré dans l’usage. Ce concept refait surface en période de crise ou après une tragédie, mais aussi pendant la planification d’un mariage ou lorsqu’une personne a besoin d’une somme considérable pour une bonne cause.

Cette expression et l’activité qu’elle désigne ont pris de l’importance dans la culture, mais le système réglementaire n’a pas réussi à les suivre. Voilà pourquoi la Conférence pour l’harmonisation des lois au Canada procède à des consultations sur son ébauche de loi intitulée Loi uniforme sur les appels informels aux dons du public et le sociofinancement (la LUAIDPS).

La réponse (en anglais seulement) de la Section du droit des organismes de bienfaisance et à but non lucratif de l’ABC à cette ébauche souligne le fait qu’elle apporte peu de changement à la version de 2011 de la Loi uniforme sur les appels informels aux dons du public (la LUAIDP), mais que ces changements sont importants et ne sont pas nécessairement positifs.

Par exemple, puisque la question des donataires admissibles est déjà fortement réglementée en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, elle n’est pas abordée dans la version de 2011 de la LUAIDP. L’ébauche de loi ferait en sorte que cette dispense s’applique à des intermédiaires qui ne sont pas assujettis aux mêmes niveaux de réglementation. Une plateforme sur Internet facilitant l’organisation d’un appel au public s’inscrirait dans la définition d’intermédiaire.

« Selon notre expérience dans la prestation de conseils à des donataires admissibles, les plateformes de sociofinancement peuvent être utilisées par des tierces parties afin d’amasser des sommes pour le compte d’un donataire admissible sans le consentement de ce dernier », mentionne la Section. « Ainsi, un intermédiaire peut amasser des fonds au nom d’un donataire admissible, en se servant de son nom et de sa marque, recevoir des dons et en garder un pourcentage sans obtenir sa permission. »

De plus, la Section ajoute que bon nombre de sites de sociofinancement s’intéressent davantage au forage de données qu’aux activités de collecte de dons et de remise des fonds amassés. « Bien que la LUAIDP ne traite pas actuellement des questions de vie privée dans les appels informels au public, ces questions doivent être étudiées parce que le forage non réglementé de données sur les donateurs constitue une question grave et importante dans les appels au sociofinancement. »

La Section recommande que les intermédiaires soient dispensés uniquement si leurs conditions d’utilisation exigent explicitement que les organisateurs d’un appel aient conclu une entente directe avec le donataire admissible, que les donateurs aient le droit de demander la suppression de leurs renseignements personnels et que, si une plateforme sur Internet organise elle-même les appels au public, elle ne soit plus dispensée de la législation.

La Section remarque que le paragraphe 4 (2) modifié de la LUAIDPS ferait en sorte que la loi offre aux plateformes sur Internet et aux intermédiaires similaires la même protection qu’une banque, malgré le fait qu’ils ne soient pas assujettis au même degré de réglementation pour les opérations financières. « Les raisons pour lesquelles la LUAIDPS n’imposerait pas des obligations aux entités de sociofinancement qui ne sont pas assujetties à d’autres règlements dans le cadre de leurs activités ne sont pas claires », affirme la Section. « Nous suggérons que cet aspect de la loi proposé soit revu et que les intermédiaires de sociofinancement qui ne sont pas des institutions financières réglementées ne soient pas dispensés d’une relation fiduciaire. »