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« Le droit n’existe pas sans unité »

John Borrows est l’un de deux récipiendaires du Prix du président de l’ABC en 2021

John Burrows

Ce que retient John Borrows des matchs de hockey de sa jeunesse avec George Armstrong et Dave Keon, c’est que les deux hommes jouaient avec honneur et fair-play. Ils étaient déterminés à gagner, mais dans le respect des autres. C’est là une leçon que Me Borrows a appliquée dans sa brillante carrière juridique.

Titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le droit autochtone à l’Université de Victoria et récemment nommé à l’Ordre du Canada, il est l’un des lauréats du Prix du président de cette année. Ses travaux remarquables ont pour fondement trois mots simples, mais forts : amitié, encouragement, espoir.

« Les anciens traités, ceux des années 1760, visaient la paix, l’amitié et le respect, dit-il, et ces trois aspects guidaient généralement les interactions de l’époque. J’essaie moi-même de les appliquer au quotidien. »

Plus qu’une noble aspiration, ces mots sont essentiels à la vie en société. « Nous pouvons avoir de belles règles de droit enchâssées dans les constitutions, la jurisprudence, les lois, déclare-t-il, mais si nous sommes cruels les uns envers les autres, ou du moins incapables de nous montrer amicaux, de voir qu’on est tous dans le même bateau, eh bien, il n’y a pas vraiment de règle qui tienne. Le droit n’existe pas sans unité, sans recherche de plaisirs et d’intérêts mutuels, sans envie de bâtir une société solidaire. »

Me Borrows, qui est Anishinaabe et Ojibwé ainsi que membre de la Première Nation des Chippewas de Nawash, en Ontario, a appris de sa mère les vertus de l’encouragement. Il se rappelle qu’elle était venue assister à une conférence en chippewa pour lui montrer son soutien, et que les étudiantes et étudiants présents ont demandé si elle pouvait leur parler. Elle a humblement refusé, expliquant que vu son peu d’instruction, elle n’était pas qualifiée pour le faire. « Je ne suis qu’une personne qui encourage la jeunesse », leur a-t-elle dit.

« J’ai alors pris conscience que c’est ce que ma mère a été pour moi sa vie durant : une personne qui encourage les autres », affirme Me Borrows, ajoutant qu’il essaie d’en faire de même pour les autres, en commençant par ses étudiantes et étudiants. « Je veux que chacun réalise ses objectifs les plus ambitieux et ses plus profondes aspirations. »

Si ses réalisations, notamment ses nombreux ouvrages, lui ont valu plusieurs récompenses, la plus grande fierté de cet homme doux et posé est d’emmener ses étudiantes et étudiants en droit mettre le nez dehors pour apprendre la loi de la terre anishinaabe, faire de la randonnée sur les rives et escarpements de la péninsule Bruce, ou grimper le Mont-Royal depuis l’Université McGill, à son pied, pour regarder les étoiles. « Chaque constellation à sa propre histoire. La Grande Ourse, en anishinaabe, se dit Ojiig’anung, ou l’étoile du pêcheur » explique-t-il à ses étudiantes et étudiants, qui partagent volontiers leurs apprentissages avec les curieux de passage.

Me Borrows est bien conscient des malheurs et de la souffrance qui afflige notre monde, mais reste optimiste. « Il serait irréaliste de ne pas reconnaître l’inspiration, les changements, les possibilités, la créativité, les progrès qui sont faits; tout ça me donne de l’espoir », dit-il, ajoutant qu’en près de trois décennies d’enseignement, il a vu beaucoup de grandes choses s’accomplir. « Les gens sont porteurs d’espoir. »

Les objectifs de l’ABC – soit un système de justice équitable, une réforme efficace du droit, l’égalité pour tous et l’éradication de la discrimination – « sont les buts vers lesquels tend notre profession entière, dans ses meilleurs moments. Ce prix en est la reconnaissance », ajoute-t-il, espérant que sa carrière les a un tant soit peu fait progresser.

 

Le Prix du président de l’ABC vise à reconnaître la contribution remarquable de juristes canadiens à la profession juridique, à l’Association du Barreau canadien ou à la vie publique au Canada. Consultez la liste des lauréates et lauréats.

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John Borrows est titulaire d’un B.A., d’une M.A., d’un J.D., d’une LL. M. (Toronto), d’un Ph. D. (Osgoode Hall Law School) et d’un LL.D. (avec spécialisation, Dalhousie, York, SFU, Queen’s et Barreau de l’Ontario). Il figure sur la liste d’honneur du recteur (Toronto), est boursier de la Société royale du Canada, Officier de l’Ordre du Canada et est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le droit autochtone à la faculté de droit de l’Université de Victoria, en Colombie-Britannique. Il a notamment publié : Recovering Canada: The Resurgence of Indigenous Law (Prix Donald-Smiley du meilleur ouvrage publié en science politique au Canada, 2002), Canada’s Indigenous Constitution (prix du meilleur ouvrage de 2011 de l’Association canadienne de droit et société), Drawing Out Law: A Spirit’s Guide (2010), Freedom and Indigenous Constitutionalism (Prix Donald-Smiley du meilleur ouvrage publié en science politique au Canada, 2016), The Right Relationship (édité en collaboration avec Michael Coyle), Resurgence and Reconciliation (édité en collaboration avec Michael Asch et Jim Tully), et Law’s Indigenous Ethics (prix du meilleur ouvrage ultérieur 2020 de la Native American and Indigenous Studies Association et prix W. Wesley Pue du meilleur ouvrage 2020 de l’Association canadienne de droit et société). Me Borrows a aussi remporté le prix Killam en sciences sociales en 2017, le prix Molson du Conseil des arts du Canada en 2019, et le Prix du gouverneur général pour l’innovation en 2020. Il est Anishinaabe et Ojibwé ainsi que membre de la Première Nation des Chippewas de Nawash, en Ontario.