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L'échec de la répression de la criminalité

La Section du droit pénal de l’ABC appuie le projet de loi C-5 qui abroge plusieurs peines minimales obligatoires.

Handcuffs

La Section affirme dans un mémoire qu’elle appuie le projet de loi C-5, qui propose d’abroger certaines peines minimales obligatoires du Code criminel et d’autres lois, en plus de mettre en place un programme de déjudiciarisation pour les infractions de possession simple de drogues. Le projet de loi C-5 « prévoit des mesures importantes en vue de réformer le Code criminel pour favoriser une procédure de détermination de la peine fondée davantage sur la preuve et les principes ».

La section croit que les politiques de « répression de la criminalité » se sont révélées être de mauvaises stratégies. « Elles ont notamment entraîné l’accroissement des retards que connaît le système et n’ont fait qu’accentuer la surreprésentation des personnes marginalisées dans le système », écrit-elle dans son mémoire.

Les peines minimales obligatoires « limitent sans raison valable le pouvoir discrétionnaire des juges qui doivent déterminer la peine, ce qui se traduit par des peines injustes, parfois cruelles et allant à l’encontre de la Charte canadienne des droits et libertés ». En plus de cela et de la surreprésentation des personnes marginalisées dans le système de justice pénale, elles entraînent des retards dans les tribunaux et n’ont pas d’effet dissuasif sur la criminalité.

La section s’oppose aux peines minimales obligatoires depuis 1995, lorsque le projet de loi C-68, la Loi concernant les armes à feu, présentait ce que le projet de loi C-5 cherche maintenant à abroger. Non seulement ces peines minimales obligatoires ne dissuadent-elles pas la criminalité, mais elles ne visent pas les délinquants les plus dangereux, qui sont déjà assujettis à des peines très strictes. Aussi, elles « vont à l’encontre des principes de proportionnalité́ et d’individualisation, des aspects fondamentaux du régime canadien de détermination de la peine ».

Les peines minimales obligatoires traitent tous les délinquants de la même façon, peu importe leur culpabilité morale ou les circonstances qui ont mené aux infractions. « Il est illogique de traiter les toxicomanes qui vendent de la drogue à leurs amis pour assouvir leur propre dépendance de la même façon que les criminels “endurcis” qui se livrent au trafic dans le seul but de s’enrichir », écrit la section, ajoutant qu’il n’y a pas de solution unique et universelle permettant de déterminer la peine.

 

Ordonnances de sursis

Le concept de l’ordonnance de sursis figure au Code criminel depuis 1996. L’intention, en partie, était de régler les problèmes de surpopulation carcérale en permettant au juge de condamner un délinquant à purger sa peine dans la collectivité, lorsque c’est la bonne chose à faire. Seuls les délinquants non dangereux y étaient admissibles, et seulement lorsque les circonstances de leurs infractions justifiaient une peine de deux ans ou moins.

« Les gouvernements successifs ont restreint les possibilités de recourir aux ordonnances de sursis, déclare la section. Il n’y a donc rien de surprenant à ce que le problème de surreprésentation des groupes marginalisés se soit empiré depuis l’adoption de ces mesures restrictives. »

La section soutient que les restrictions aux ordonnances de sursis sont discriminatoires, que leur portée est trop large et qu’elles ne permettent pas d’atteindre leur objectif. Pour cette raison, elle est d’accord avec l’abrogation des restrictions énoncées dans le projet de loi C-5, qui profitera aux délinquants autochtones ou marginalisés, et les appuie.

En ce qui concerne les personnes qui prétendent que les ordonnances de sursis sont trop clémentes, la section riposte en affirmant que « purger une peine, confiné chez soi sous la menace d’emprisonnement est une lourde peine pour les délinquants non dangereux (les seuls admissibles à une telle peine). Si la pandémie de la COVID-19 nous a appris une chose, c’est bien que le fait d’être contraint de rester à la maison, sauf pour aller faire ses courses ou travailler, constitue une peine non négligeable ».

Déjudiciarisation

Finalement, la section appuie le recours à des mesures de rechange en cas de possession simple de substances contrôlées. Contrairement à la criminalisation, ce recours ne stigmatise pas les personnes aux prises avec des problèmes de toxicomanie ou ne les étiquette pas comme des criminels, et il évite de leur infliger un casier judiciaire qui rendent beaucoup plus difficile la recherche d’un emploi ou l’accès à des mesures de soutien social.

La déjudiciarisation des infractions liées à la possession simple devrait être la position par défaut du ministère public, conclut la section.