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Pourquoi changer ce qui fonctionne bien?

La Section du droit de la concurrence et de l’investissement étranger de l’ABC exhorte les députés qui examinent la Loi sur la concurrence à le faire avec prudence.

Matthew Boswell, Competition Commissioner
Matthew Boswell, Competition Commissioner

Le Canada possède l’un des régimes d’application du droit de la concurrence le plus sophistiqué du monde, dit la Section du droit de la concurrence et de l’investissement étranger de l’Association du Barreau canadien. C’est la raison pour laquelle ce n’est que très prudemment que la Loi sur la concurrence doit être modifiée, au terme de délibérations appropriées et de l’examen de tous les éléments de preuve afin d’éviter de graves conséquences imprévues.

Dans des commentaires destinés au Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes alors qu’il étudie la compétitivité au Canada, la section souligne à quel point il est important de ne pas s’empresser à promulguer de modifications et de faire en sorte que la Loi demeure centrée sur les facteurs économiques et les objectifs de politique spécifiquement canadiens. Cet article présente quelques-uns des enjeux commentés par la section.

Fusions et acquisitions, gains en efficience

Le Bureau de la concurrence examine attentivement les fusions et acquisitions, particulièrement les fusions complexes. « Le Bureau oblige généralement la production de dizaines de milliers de documents et de données internes de l’entreprise remontant à plusieurs années, qui sont examinés par une grande équipe d’agents chargés du dossier, d’économistes et de juristes, afin de déterminer si une transaction doit être refusée ou approuvée, sous condition ou non », écrit la section.

En outre, il a des antécédents bien établis de promotion de la concurrence conformément aux objectifs de la Loi et est très bien armé pour veiller à la conformité, y compris des « enquêtes formelles et informelles, la possibilité de demander l’autorisation d’un tribunal sur une base ex parte afin d’obliger la production de documents et le témoignage, et même des pouvoirs de perquisition et de saisie dans les entreprises dont la conduite est mise en doute. »

Qui plus est, aux dires de la section, le budget fédéral 2021 « renforce le régime en augmentant considérablement les ressources du Bureau au cours des cinq prochaines années. À notre avis, ce ne serait pas prudent de se précipiter pour modifier les lois canadiennes en matière de concurrence, compte tenu du travail en cours du Bureau et de l’augmentation récente de ses ressources. » Nous devrions accorder au Bureau le temps nécessaire pour utiliser ses ressources et attendre jusqu’à ce qu’il ait eu la possibilité de déterminer les questions connexes à l’application qui demeurent en suspens avant d’envisager de modifier la Loi.

La section met en garde contre le fait de dire que la défense fondée sur les gains en efficience favorise les entreprises au détriment des consommateurs. Selon elle, la défense est « une approche équilibrée dans laquelle certains accords ou fusions peuvent être évalués selon leurs propres mérites afin de déterminer si les gains en productivité et en innovation l’emportent sur les coûts potentiels d’une concurrence réduite ». Elle ajoute que les gains en efficience présentent d’importants avantages économiques pour la population canadienne en produisant des économies d’échelle, une meilleure productivité et une innovation accrue.

« L’objectif des lois canadiennes en matière de concurrence est de prévenir les comportements anticoncurrentiels plutôt que la consolidation de l’industrie elle-même », dit la section, et l’un des principaux mandats du ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie est de soutenir les écosystèmes novateurs pour aider les entreprises à se développer. Les consolidations qui n’érigent pas d’obstacles insurmontables à l’entrée ne sont pas incompatibles avec une solide concurrence.

Économie numérique

Il ne fait aucun doute que notre dépendance envers l’Internet soulève des questions au sujet de la collecte des données et des droits à la vie privée des consommateurs. Cependant, la section n’est pas d’avis qu’il échoit au Bureau de la concurrence de relever ces défis. « Les préoccupations concernant la collecte, l’utilisation et la diffusion de renseignements personnels et de données par les grandes entreprises technologiques sont abordées dans le cadre des modifications proposées à la loi canadienne sur la protection de la vie privée dans le projet de loi C-11, la Loi de 2020 sur la mise en œuvre de la Charte du numérique », dit-elle, avant d’ajouter qu’elles devraient être abordées prudemment afin d’éviter de nuire par inadvertance au comportement novateur et concurrentiel.