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Lunch avec : Mahmud Jamal and W. David Rankin

Sushis et leçons de plaidoirie.

Mahmud Jamal et David Rankin chez Hiro Sushi, à Toronto
Mahmud Jamal et David Rankin chez Hiro Sushi, à Toronto

LES CONVIVES

L’ASSOCIÉ : Mahmud Jamal, associé, Litige, Osler Hoskin & Harcourt S.E.N.C.R.L/s.r.l., Toronto

BIO : Plaideur invétéré (32 pourvois à la Cour suprême du Canada), Me Jamal est avocat-conseil bénévole pour l’ABC dans l’affaire Procureur général du Canada c. Chambre des notaires du Québec dont le plus haut tribunal du pays sera saisi en novembre

LE SOCIÉTAIRE : W. David Rankin, sociétaire, litige, Osler Hoskin & Harcourt S.E.N.C.R.L/s.r.l., Toronto

BIO : Me Rankin a joint les rangs d’Osler en 2012, après avoir été assistant judiciaire pour le juge Morris J. Fish à la Cour suprême du Canada. Il est spécialisé en contentieux commercial général

 

« Un plaideur, c’est un conteur, déclare Mahmud Jamal à une table de Hiro Sushi, sur l’animée rue King de Toronto. Le plus intéressant dans la pratique, c’est d’aborder un dossier touffu qui s’en va en première instance ou en appel, puis de façonner le récit pour dissiper progressivement la confusion. C’est très agréable, très satisfaisant. »

Malgré la quiétude du restaurant, il faut tendre un peu l’oreille pour entendre l’avocat répondre posément à son jeune collègue et mentoré, David Rankin. Le mentorat, croit Me Rankin, est essentiel au développement des compétences, professionnelles ou périphériques, qui déterminent la réussite. « Un avocat gagne toujours à consulter ses collègues », remarque-t-il.

Me Jamal souligne l’importance d’apprendre le métier d’un professionnel d’expérience – en commençant par l’écriture du mémoire, plus difficile qu’il n’y paraît. Il préconise d’apprendre à poser un problème, à rédiger un mémoire et à interjeter appel efficacement. « Le plaidoyer doit étayer le mémoire, et non en pallier les insuffisances », explique-t-il.

Il faut prendre le temps de bien connaître les faits avant d’organiser la plaidoirie et de choisir la meilleure trame narrative – qu’est-ce qui en appellera au sens de l’équité des juges? –, et imaginer le jugement final. « Visualiser l’arrêt dans les recueils de jurisprudence est un bon exercice, car cela vous rappelle les préoccupations essentielles des juges »

Me Jamal retient une précieuse leçon de son mentor, Edgar Sexton, sur l’importance de traiter tout le monde avec courtoisie et respect. Un client de la partie adverse avait demandé à ce dernier s’il pourrait le représenter dans une cause future. « J’ai été impressionné par sa politesse et son ouverture à voir quelqu’un contre qui il venait de plaider comme un client potentiel, relate Me Jamal. Comme quoi il faut toujours faire de son mieux au tribunal! »

L’un des plus grands défis du métier, à son avis : se faire bombarder de questions par le juge. Son conseil : en profiter pour « embrayer sur ses principaux arguments » tout en répondant à la question. « Parfois, le juge essaie activement de vous aider ou de persuader un confrère; parfois, il veut simplement clarifier un point. On ne vous tend pas forcément un piège. »

Il ajoute que même si les faits font foi de tout, il ne faut pas moins en appeler au sens de l’équité du juge. Il cite l’exemple de son mentor, qui s’était mis à débattre avec un juge de l’interprétation de la loi. « Avant de s’enfoncer, il est revenu sur le caractère équitable de sa position, et ce fut très efficace. Je pense qu’au final, beaucoup de juges se laissent guider par leur sens de l’équité. »

À la question de Me Rankin sur la meilleure façon pour les avocats débutants de commencer à plaider en cour d’appel, Me Jamal recommande de faire connaître son intérêt et d’être prêt à saisir les occasions.

Il encourage les jeunes à trouver ce qui les passionne, à visualiser qui ils veulent être et ce qu’ils veulent faire, puis à agir pour faire de cette vision une réalité. « Il suffit, pour accélérer le processus, de faire de l’excellent travail et de se faire reconnaître pour ses mémoires solides et impressionnants. »

Au sortir de table, Me Jamal a un dernier conseil pour son collègue : « Profite de l’aventure sans trop t’inquiéter de son issue. Les choses se feront d’elles-mêmes. »