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Le projet de loi sur les langues autochtones est édenté

Une loi qui ne peut être appliquée est un vœu pieux.

Inuit mother and child
iStock

Une loi qui prétend protéger les droits connexes aux langues autochtones sans fournir de moyen de défendre ces droits s’apparente à une « promesse creuse », affirme la Section du droit des autochtones de l’ABC, en réponse à la proposition de projet de loi C-91, Loi sur les langues autochtones émanant du gouvernement.

Ce n’est pas de la première fois que le Canada a dû ajouter des dispositions sur l’application de la loi dans une loi sur les langues : la Loi sur les langues officielles a été modifiée après l’arrêt Forum des maires de la Péninsule acadienne c. Canada (Agence canadienne de l’inspection des aliments) rendu par la Cour d’appel fédérale. Cette dernière a statué que le but des recours est de veiller à ce que la loi « ait des dents, que les droits ou obligations qu’elle reconnaît ou impose ne demeurent pas lettres mortes, et que les membres des minorités linguistiques officielles ne soient pas condamnés à se battre sans cesse et sans garantie au seul niveau politique ».

C’est la raison pour laquelle la section recommande que le gouvernement fasse en sorte que la Loi sur les langues autochtones puisse être exécutoire en y ajoutant des recours pour veiller à la mise en œuvre pleine et entière des droits reconnus par le projet de loi C-91.

La section se fonde sur un solide plaidoyer pour défendre la nécessité d’une législation qui protège les droits linguistiques autochtones, soulignant que le gouvernement n’a pas été étranger à la mise en péril de ces mêmes langues, en partie par l’entremise des pensionnats qui ont fait de leur mieux pour les éradiquer.

« Les pensionnats indiens ont été une tentative systématique émanant du gouvernement de détruire les cultures et les langues autochtones et assimiler les peuples autochtones afin qu’ils n’existent plus en tant que peuples distincts », affirme le Rapport sur la vérité et la réconciliation, dont quatre des 94 appels à l’action traitent de la question de la suppression des langues autochtones et exhortent à la reconnaissance des droits linguistiques autochtones en tant que précieux élément de la culture canadienne.

La section dit du projet de loi C-91 qu’il représente une occasion de changer l’histoire du Canada en honorant et en respectant les droits autochtones et les droits linguistiques.

Si l’histoire n’est pas une raison suffisamment impérieuse, la section souligne aussi que les langues autochtones sont protégées par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. La Constitution reconnaît et confirme les droits des peuples autochtones et les droits issus des traités, ce qui, a confirmé la Cour suprême, inclut les pratiques culturelles et, par conséquent, la langue, qui fait partie intégrante de la culture. La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones reconnaît elle aussi les droits linguistiques autochtones.

« Si les mesures sont prises pour donner suite à notre recommandation, le projet de loi C-91 ne sera pas une autre promesse creuse faite aux peuples autochtones pour leur garantir un contrôle indépendant de la part du pouvoir judiciaire dans la préservation et la promotion des droits linguistiques autochtones du Canada. »